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09 Jul

Une cheffe d'orchestre et chanteuse ~ une Femme qui dirige ()()()

Publié par La pintade rose  - Catégories :  #Femmes Femmes..., #j'aime

Ce soir au Théâtre Antique d'Orange, 9 juillet, Mefistofele d'Arrigo Boito sera donné dans une mise en scène de Jean-Louis Grinda. Créé à La Scala de Milan en 1868, il s'agit du premier opéra du compositeur, basé sur le Faust de Goethe. Si la première est un échec, cet opus connaît un réel succès après remaniements. Pour la première fois aux Chorégies d'Orange, c'est une femme qui tiendra la baguette : Nathalie Stutzmann. A cette occasion, c'est encore une belle distribution qui foulera la scène du Théâtre Antique : Erwin Schrott campera le rôle-titre, entouré de Jean-François BorrasReinaldo MaciasBéatrice Uria-MonzonValentine LemercierSylvie Brunetet Carmen Giannattasio. L'Orchestre Philharmonique de Radio France officiera lors de cette soirée.

La chanteuse passe à la direction d'orchestre. Une réussite.

Elle a le regard déter­miné de celles que rien n'effraie. Ni les ­quolibets de l'orchestre et sa fosse ­commune, ni les revers de fortune. Un regard où se disputent la séductrice et la femme de pouvoir: celle qui plaît et celle qui veut plaire. À 45 ans, Nathalie Stutzmann vient de relever un impensable défi: chanter et diriger en même temps ! C'est fascinant de la voir (comme jeudi soir à Gaveau) conduire son ensemble Orfeo 55 d'un œil scrutateur, d'un geste large et conquérant, puis se tourner vers le public et entonner un air en continuant de battre la mesure.

Dans l'art du chant, cette force de la nature au rare timbre de contralto lyrique n'a plus rien à prouver. Qu'il s'agisse d'opéra baroque, de la Rhapsodie pour alto de Brahms ou d'un simple lied de Schubert, son timbre ombragé, ses graves telluriques déroutent ou envoûtent, mais c'est toujours la même valse de sentiments, la même émotion qui transperce l'auditeur lorsqu'elle commence à chanter d'une intensité contenue presque surnaturelle.

Pour la direction, en revanche, elle avait tout à construire. Et à déconstruire. En fondant il y a deux ans son propre orchestre, Orfeo 55, avec lequel elle signe dans la foulée un contrat chez Deutsche Grammophon et trouve résidence à l'Arsenal de Metz, elle doit abattre bien des idées reçues en cumulant deux handicaps sérieux: «Passer du chant à la direction, et être une femme dans un milieu d'hommes.» D'autant qu'elle ne s'en tient pas à redécouvrir le répertoire baroque avec Orfeo 55, mais ambitionne de se mesurer régulièrement au grand répertoire symphonique avec des orchestres modernes, comme elle vient de le faire à Montpellier, et le fera bientôt à l'Opéra de Nancy.

«En cachette» 

Ce désir d'exercer son pouvoir de séduction devant un parterre de musiciens ne date pas d'hier. «J'ai toujours pensé que les deux plus beaux instruments étaient la voix et l'orchestre, confesse-t-elle. Mais lors de mes études, au début des années 1980, la question des femmes chefs d'orchestre était encore taboue.» Premiers découragements, premier entêtement. Faute de trouver une oreille bienveillante chez ses éducateurs, elle se contente d'étudier seule les partitions. Et d'observer. «Comme chanteuse, j'ai eu la chance de côtoyer de grands chefs. J'ai absorbé leur art en ­cachette pour trouver mon développement harmonique en imagination, faute de pouvoir m'exercer.» 

 

Nathalie Stutzmann naît le 6 mai 1965, à Suresnes, dans une famille d'artistes lyriques. Son père, un baryton, et sa mère, une soprano lyrique, lui montrent la voie. Dès son plus jeune âge, Nathalie fait des études approfondies de piano, basson, musique de chambre et direction d’orchestre. Elle obtient un premier prix de piano et de musique de chambre en 1982. Elle étudie également le basson et commence ses études de chant avec sa mère, Christiane Stutzmann.


En 1983, elle gagne le 1er prix de chant et art lyrique du conservatoire de Nancy. Elle entre à l’Opéra de Paris dans la classe de Michel Sénéchal. La même année, elle remplace au pied levé Jessye Norman lors d’un concert privé avec Iouri Bachmet. Elle signe alors son premier contrat chez Erato.


De 1983 à 1987, elle rencontre Hans Hotter, dont elle suit les master class, et débute en 1986 à l’Opéra Garnier dans Didon et Enée de Purcell.


En 2008, elle commence une carrière de chef d'orchestre lors d'une tournée au Japon. En 2009, elle fonde son propre orchestre de chambre, Orfeo 55, un ensemble jouant aussi bien sur instruments baroques que modernes. Son ensemble s’est déjà produit en France, à Metz, Paris, Strasbourg, Angers, Avignon, Toulouse mais aussi en Espagne, notamment à Madrid et Valence, en Suisse, aux Pays-Bas, ainsi que dans les grands festivals, comme ceux de Verbier, Ambronay, St Riquier, Sisteron, Auvers sur Oise ou Sablé sur Sarthe.
Son disque Prima Donna, sorti en avril 2011, est son premier en tant que chanteuse et chef d'orchestre. Elle y reprend des airs pour contralto d'Antonio Vivaldi extraits d'opéras et oratorios dont Judita Triomphans, Arsilda Regina di Ponto, Tieteberga, Il Giustino, L’Olimpiade, La Costanza trionfante dell ‘Amore e dell’ Odio, Andromeda liberata, l’Altenaïde, Semiramide…

En novembre 2012, son disque Une cantate imaginaire est consacré aux airs chantés et pièces orchestrales de Johann Sebastian Bach qu'elle affectionne : Erbarme dich de la Passion selon saint Matthieu, Bist du bei mir, Jésus que ma joie demeure, la Sinfonia de la Cantate BWV 174, la Sinfonia de la Cantate BWV 42… Son dernier disque, Heroes from the Shadows, paru en novembre 2014 chez Erato (label), met en lumière les héros de l’ombre dans les opéras de Georg Friedrich Haendel. On y retrouve des airs extraits de Giulio Cesare, Orlando, Radamisto, Amadigi, Silla ainsi qu'un duo avec le contre-ténor Philippe Jaroussky.


Elle est régulièrement invitée pour diriger 'lOrchestre de Philadelphie, l'Orchestre philharmonique de Londres, l'Orchestre philharmonique de Rotterdam, l'Orchestre philharmonique de Bergen, l'Orchestre philharmonique d'Oslo, le Konzerthausorchester Berlin, l'Orchestre symphonique de la radio-télévision irlandaise, le National Symphony Orchestra de Washington, l'Orchestre philharmonique royal de Stockholm, l'Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, l'Orchestre symphonique de Detroit, l'Orchestre symphonique de Saint-Louis, l'Orchestre national d'Espagne et l'Orchestre national Bordeaux Aquitaine.


 En février 2017, elle a été unanimement saluée par la presse et le public avec sa direction de Tannhäuser de Wagner à l’Opéra de Monte-Carlo. En 2018, elle dirigera l’Orchestre Philharmonique de Radio France dans Mefistofele de Boito aux Chorégies d’Orange.


Elle mène également une carrière de chef d’orchestre au Japon, avec le Nouvel orchestre philharmonique du Japon et l'Orchestre de chambre de Mito de Seiji Ozawa qui l'invite régulièrement à co-diriger des concerts avec elle.


Depuis 2015, elle est Artiste Associé Principal de l'Orchestre symphonique d'Etat de São Paulo, et occupe depuis septembre 2017 le poste de Chef Principal Invité de l’Orchestre symphonique de la radio-télévision irlandaise de Dublin. A partir de septembre 2018, elle sera Chef Principal de l'Orchestre symphonique de Kristiansand en Norvège.
Sous contrat d'exclusivité avec la maison de disque Erato, elle enseigne à la Haute École de musique de Genève.

Une cheffe d'orchestre et chanteuse ~ une Femme qui dirige ()()()

▪ En 1988, elle remporte le 1er prix du concours international de chant Neue Stimmen de la fondation Bertelsmann.
▪ En 1993, elle reçoit le Grand prix de la critique du disque allemand pour son enregistrement de lieder de Schumann.
▪ En 2001, elle est faite Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres.
▪ En 2012, son disque Prima Donna est nommé dans la catégorie « Enregistrement de l'année » aux Victoires de la musique Classique.
▪ En 2012, elle est élevée au grade de Chevalier dans l’Ordre national du Mérite par la Ministre de la Culture, Aurélie Filippetti.
▪ En 2013, elle est nommée dans la catégorie « Artiste lyrique de l'année » aux Victoires de la musique Classique.
▪ En 2015, elle est élevée au grade d'Officier de l’Ordre des Arts et des Lettres.
 

Une cheffe d'orchestre et chanteuse ~ une Femme qui dirige ()()()

▪ Elle a appelé son ensemble Orfeo 55 en hommage au personnage d'Orphée, son premier amour lyrique, et y a ajouté 55 car le 5 est un chiffre qui marque sa vie.
▪ Le logo de son ensemble Orfeo 55 est une statuette en papier mâché qui rappelle Alberto Giacometti et qu'on lui a offerte alors qu'elle chantait avec l'Orchestre Symphonique de São Paulo au Brésil.

▪ « Il y a deux types d’artistes : ceux qui s’attachent toute leur vie à montrer à quel point ce qu’ils sont en train de faire est difficile – ils ont leur public –, puis il y a ceux qui passent leur vie à essayer de faire croire que ce n’est pas du tout difficile, catégorie à laquelle j’appartiens. C’est sans doute aussi une forme de folie. C’est moins spectaculaire, peut-être, mais je préfère que le public puisse aller à l’essentiel. Je ne veux pas qu’il s’arrête à la performance, tout en la remarquant, mais qu’il puisse s’abandonner d’abord à la beauté de la musique. »
▪ « Je rêve d’une belle basse ou d’un vrai mezzo-grave. Le son grave existe dans notre société. Il faut rétablir la balance. »
▪ « J'ai toujours ressenti ce désir de diriger un orchestre, cela a toujours été ma seconde passion, mon deuxième rêve. La voix était prioritaire pour des raisons évidentes de temps et d'âge, et la décision de créer mon orchestre est survenue à un moment où j'étais consciente d'avoir réalisé une grande partie de mes rêves en tant que chanteuse. »

On lui doit plus de soixante enregistrements, parmi lesquels :
▪ Georg Friedrich Haendel : Amadigi di Gaula. Sous la direction de Marc Minkowski, Les Musiciens du Louvre. Erato, 1991.
▪ Felix Mendelssohn, Johannes Brahms : Récital. Avec Dalton Baldwin, Gérard Caussé, François-René Duchable. Erato, 1991.
▪ Johann Sebastian Bach : Passion selon Saint Jean. Sous la direction de Enoch zu Guttenberg

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